Je reçois beaucoup de personnes prêtes à de nombreux efforts pour atteindre leurs objectifs. Le plus souvent des objectifs liés au poids (perdre, parfois prendre), et régulièrement en lien avec des troubles digestifs. Bien entendu, ces efforts seront utiles, nécessaires même. Mais avant cela, je commence toujours par la règle #1 pour moi en nutrition. Gratuit, facile, mais pourtant tout un programme !
Quelle est ma règle #1 en nutrition? La mastication !
Je vous l’avais dit, c’est tellement simple que l’on peut se demander ce que cela pourrait changer ! Je garde précieusement les témoignages ravis de tant de personnes soulagées, surprises d’avoir découvert l’importance de ce geste pourtant anodin. Cela me permet de répéter ce conseil, confiante. Et de relancer le sujet, à chaque rendez-vous. Est ce facile à mettre en place? Est ce devenu une nouvelle habitude? Bien souvent, ces rappels sont nécessaires, et parfois ne suffisent même pas à rétablir cette bonne habitude. Il faut bien en comprendre les enjeux pour se motiver et s’engager dans une véritable “rééducation” masticatoire.
La répartition des tâches entre collègues de digestion
Un des premiers effets positifs de la mastication est le confort digestif. Moins de reflux et d’aigreurs d’estomac, moins de ballonnements. Quel bonheur !
Comparons la digestion avec le fonctionnement d’une entreprise. Chaque service a ses compétences. L’entreprise ne peut fonctionner à long terme que lorsque chacun·e fait son travail avant de passer à l’étape suivante. Ainsi, imaginez votre estomac qui, inlassablement, reçoit un travail “ni fait ni à faire” de la part de l’étage supérieur. Il commence par râler, mais fait preuve de courage pour assurer sa tâche: ramollir les aliments dans son bain acide, les remuer jusqu’à déconstruire les aliments pour voir apparaitre des nutriments. L’estomac peut tenir un moment en sur-régime. Mais, malgré toute sa bonne volonté, il n’a pas de dents. Il n’est pas équipé pour remplacer la bouche un peu fainéante. Il risque de perdre en efficacité, voire d’abandonner son poste. Le burn-out gastrique… Que devient donc le service suivant?
L’intestin récupère un contenu pas tout à fait assimilable. Voire même des morceaux d’aliments relativement gros – pensez-y lors du prochain plat de coquillettes, qui glissent, bien beurrées, sans même un coup de dents. C’est à la fois lourd à digérer, et inefficace pour assimiler les nutriments. Les éléments mal digérés risquent de fermenter, engendrant des ballonnements, voire de l’inflammation.
Quand la bouche réapprend son métier et se met à le faire consciencieusement, toute l’entreprise est soulagée. Les dents écrasent et broient. La salive ramollit les aliments et prépare la digestion, notamment grâce à son enzyme, l’amylase. Et la salive permet aussi aux saveurs de parvenir plus facilement dans nos papilles gustatives. Car, manger, c’est avant tout un moment plaisir !
Manger, un moment plaisir
Accorder un vrai temps à son repas permet une meilleure satiété, et un plus grand plaisir de manger. C’est important. Nous ne mangeons pas seulement dans un but calorique. Nous mangeons également par besoin émotionnel, culturel. Prendre le temps, c’est savourer et profiter de son repas au maximum. Et, bien sûr, ajuster les portions au plus proche des besoins physiologiques. Pas besoin de manger en excès quand j’ai savouré chaque bouchée. Pas envie de grignoter entre les repas si mes repas m’ont comblée.
Un déjeuner bien mastiqué signe aussi un début d’après midi moins soporifique. La digestion vous prend moins d’énergie si vous mastiquez. Vous abordez le quotidien avec plus de dynamisme et de légèreté.
Un dîner bien mastiqué vous offrira quant à lui un sommeil de meilleure qualité. Ce n’est pas le seul critère, mais il vaut la peine d’être essayé. Tellement facile !
Alors, la règle #1 devient celle du bien-être profond en lien avec votre nutrition. Et bien sûr au service de la régulation de notre poids. Ce court passage de l’édito carré souligne ce lien poids/mastication.
Mastiquer, cela s’apprend
Après une grosse entorse, vous allez vous astreindre à des séances de kinésithérapie, deux fois par semaine, surtout si vous préparez un concours de danse ou une compétition d’escalade. Pas très sympa (tout dépend des kinés, à Indre l’équipe est au top !), mais absolument nécessaire pour retrouver toutes vos aptitudes physiques. Abordez les exercices suivants dans le même esprit. C’est parti pour 6 mois de rééducation. Progressive, et motivante car les résultats ne se font pas attendre. Et le réflexe s’inscrit en vous durablement.
La règle #1 en nutrition s’apprend en jouant !
Choisir 3 bouchées par repas à mastiquer 20 fois. On fait 3 nœuds à sa serviette à la fin du repas pour le repas suivant, on sort un petit papier nous le rappelant quand on met la table. On en fait un jeu avec les membres de la famille, les collègues. Très rigolo quand le petit dernier choisit le yaourt…
Déguster de tous ses sens : apprécier et définir les saveurs, textures, parfums, couleurs, cuisson. En sentant l’effet sur la langue, sur le palais, d’une bouchée mêlant plusieurs ingrédients, mais aussi de chaque aliment pris séparément.
Poser sa fourchette toutes les 5 bouchées, en progressant jusqu’à 3 puis 2 bouchées.
L’attention que nous portons à nos repas montre comment nous considérons notre nourriture : parfois du remplissage, devant les infos, avec notre smartphone, en faisant les courses, en travaillant. Ne nous étonnons pas si notre corps nous montre que cela ne lui convient pas. Mais changeons. Maintenant. Inversons la consigne que nous avons sûrement entendue le plus souvent, depuis l’enfance : “mais dépêche toi de finir !”
Donnez-vous de quoi mâcher
Nous mastiquons peu car l’offre alimentaire le requiert peu: aliments mous, onctueux, moelleux, hachés, prédécoupés ou même croustillants, sans résistance sous la dent. Intégrez à chaque repas des aliments consistants :
Du cru : crudités de saison, salades simples ou panachées, brocoli cru plutôt que cuit.
Du complet : riz, pâtes, pain, biscottes, gâteaux et pizzas à la farine complète.
Des morceaux : carotte à croquer, poêlée au lieu de purée, pomme au lieu de compote.
Du fibreux : légumes secs, algues, céleri, rhubarbe, poireau, viandes à potées ou à mijotés.
Du croquant : noix et graines, seules ou ajoutées aux plats, chou cru, cuisson wok ou al dente.
Du ferme : fruits secs, pâtes al dente, fruits de mer, pain de la veille, viandes et volailles, fromages à pâte dure.
Du vrai : pain et non pain de mie, steak plutôt que haché, muesli au lieu de céréales fourrées.
Préparer le plus possible nos repas nous aidera à mieux manger. Cela nous demande d’équilibrer notre temps. D’apprendre à nous organiser pour être efficace. De choisir des matières premières qualitatives. Cela nous ramène au choix d’aliments à plus haute valeur micronutritionnelle et à éviter les calories vides.
Quand je parle de cette règle #1 en nutrition, je précise souvent que je ne mâche pas 20 fois chacune de mes bouchées. Il ne s’agit ni d’un but à atteindre, ni d’un minimum. Pour ma part, c’est plutôt autour de 40, 50 fois par bouchée. Jouez avec cette sensation, concentrez votre attention pendant quelques semaines, pour adopter votre propre rythme. C’est la seule façon de vous approprier chaque découverte au fil du chemin.